Septième édition de la Coupe du Monde et retour sur le continent américain, c’est au Chili que se dispute la compétition, l’Italie se qualifie mais a le “malheur” de tomber dans le même groupe que le pays organisateur.

Le Chili, modeste nation du football et pays en voie de développement se voit confier l’organisation de la Coupe du Monde 1962, elle bat l’Argentine et l’Allemagne qui elles aussi n’avaient encore jamais organisé cette compétition. L’Argentine était pourtant favorite, mais le soutien du rival brésilien pour la candidature chilienne a fait la différence.

Qualifications

Il est probable que les éliminatoires d’une Coupe du Monde pour la Squadra Azzurra ne seront jamais aussi cocasses. Alors que la plupart des groupes de la zone Europe étaient composés de trois nations européennes, l’Italie a le droit à une formule spéciale. Elle doit dans un premier temps affronter la Roumanie sur un match aller-retour mais ces derniers déclarent forfait, là voilà au match suivant où elle affronte l’Israël qui dans l’autre match a disposé de l’Éthiopie. Si l’Italie s’impose sur l’ensemble des deux matches, elle ira au Mondial tout simplement. Ce n’est pas ce qu’on appelle un parcours semé d’embûches.

Le coup-franc de Mariolino Corso

Le match aller se dispute à Tel Aviv au stade Ramat Gan, un adversaire en apparence facile mais au bout d’un quart d’heure Stelmach ouvre le score de la tête sur corner avant que Young ne double la mise, 2-0 pour Israël c’est le score à la mi-temps. Heureusement l’Italie se réveille, l’oriundo Lojacono transforme un penalty obtenu par Sivori et réduit la marque peu après la reprise. C’est seulement à la 79ème minute que l’égalisation arrive, elle est signé un autre oriundo, le brésilien Altafini, enfin un doublé de Mariolino Corso (dont un de ses mythiques coup-franc) offre la victoire finale sur le score 4-2. Le retour s’annonce plus simple donc et est effectivement une formalité, victoire 6-0 à Turin avec un quadruplé d’Omar Sivori (le plus célèbre des oriundi), les autres buts sont signés Angelillo et Corso. L’Italie a gagné son billet pour le Chili.

Match aller: 15.10.61 (Tel Aviv) 2-4 (Stelmach, Young / Lojacono, Altafini, Corso x2)

Match retour: 04.11.61 (Turin) 6-0 (Sivori x4, Angelillo, Corso)

Phase Finale

C’est une Coupe du Monde qui a un format rodé désormais, 16 nations, 4 groupes puis quarts, demis et finale, personne ne manque à l’appel hormis la France de Kopa éliminée par la Bulgarie. On y retrouve le Brésil de Pelé, l’Argentine toujours à craindre, l’Espagne de…Puskas et Di Stefano, la Tchécoslovaquie de Masopust, la Yougoslavie de Skoblar, l’URSS championne d’Europe de Yachine, l’Angleterre de Moore mais également l’Allemagne de l’Ouest d’Uwe Seeler. C’est un très beau plateau, peut-être le meilleur depuis la création de la compétition, seulement la qualité de jeu ne sera pas forcément au rendez-vous, bien au contraire.

Une photo de groupe de l’Italie avant de partir pour le Chili

C’est une belle Équipe d’Italie, très douée techniquement qui s’envole pour le Chili, l’entraineur est Giovanni Ferrari, double champion du Monde avec l’Italie en tant que joueur, il est assisté par le président de la Spal Ferrara Paolo Mazza et homme de confiance du président de la Fédé italienne, une situation encore et toujours bancale donc. On attendait Helenio Herrera (qui dirigera finalement son Espagne pendant ce Mondial) ou encore “Il Paron” Nereo Rocco fraichement champion d’Italie avec le Milan AC, mais ce fut cette commission technique considérée comme peu compétente et influençable pour beaucoup qui partit pour le Chili. L’Italie se prépara d’abord pendant 15 jours à San Pellegrino, l’interiste Corso pourtant décisif pour la qualification de l’Italie n’est pas de la partie, en effet, il se refusa de ne pas être titulaire indiscutable. Entre la qualification contre l’Israël et le début de la compétition, la Nazionale n’a joué que deux matches amicaux pour se roder, face à la France qu’elle bat 2-1 et à la Belgique qu’elle bat 3-1.

Sivori tout proche de marquer contre la RFA

L’Italie est accueillie triomphalement à Santiago du Chili, elle fait clairement partie des favoris, une équipe solide et organisée avec la touche technique des oriundi. La Nazionale se retrouve donc dans le groupe du Chili pays organisateur, mais aussi avec la RFA et la Suisse qui l’élimina huit ans plus tôt. La compétition débute contre l’Allemagne, la tactique adoptée est un 424 transformable en 433, c’est un match équilibré, la Squadra Azzurra aurait même pu l’emporter, l’épine dorsale de l’équipe est milanista, l’attaque Rivera-Altafini-Sivori est probablement une des meilleures que l’Italie ait pu aligner dans son histoire, le score est de 0-0 mais l’impression a été très bonne.

La bataille de Santiago

Elle doit maintenant affronter le Chili, seulement entre temps, des articles parus sur des journaux italiens dressant un portrait peu flatteur du pays hôte de la compétition sont arrivés jusqu’au Chili, les journalistes locaux s’empressent d’en parler aux radios, le peuple chilien est furax. C’est dans ce contexte que l’Italie s’apprête à jouer ce match, mais à cela va s’ajouter l’incompétence de la commission technique qui décide de changer pas moins de 7 joueurs par rapport à la rencontre contre l’Allemagne, prétextant la fatigue. Seulement, l’incontournable Sivori avait surpris la veille du match ses entraineurs faire la formation, il rameute certains de ses coéquipiers pour les espionner, Ferrari et Mazza se retrouvaient avec les journalistes italiens pour faire la formation !

Et Ramirez ouvre le score pour le Chili

Face à l’enfer de Santiago le duo de Bologne Tumburus-Janich fait ses débuts en sélection, dans les buts le palermitain Matrell à sa deuxième cap, Lorenzo Buffon et le capitaine Cesare Maldini sont sur le banc, tout comme Omar Sivori. Bref, ça commence déjà mal mais le pire est à venir, ce match sera renommé la “bataille de Santiago”, une véritable chasse à l’homme menée par les Chiliens avec l’arbitre anglais Aston pour complice. Les coups bas de la part des locaux volent et les Italiens ne peuvent pas s’empêcher de réagir, Ferrini réagit à un coup de pied (et loupe pourtant sa cible)…l’arbitre anglais expulse l’italien après 7 minutes de jeu, Maschio se prend une droite par Sanchez, fracture du nez et rien pour le Chilien, David est lui aussi expulsé en fin de première mi-temps. L’Italie doit résister à 9, elle tient héroïquement jusqu’à la 74ème minute lorsque Ramirez ouvre le score, puis un quart d’heure plus tard Toro mette fin au suspens.

Mora pour le premier but face à la Suisse

Après deux matches, l’Italie est virtuellement éliminée, il faut que la RFA perde contre le Chili et que l’Italie l’emporte face à la Suisse en soignant sa différence de but. Les Allemandes de l’Ouest disposent des Chiliens 2-0 et ces deux nations sont qualifiées. La Nazionale dispose facilement de la Suisse déjà éliminée, on refait tourner quelque peu, le juventino Mora ouvre le score et Bulgarelli à ses grands débuts en sélection s’offre un doublé. C’est donc une victoire inutile, l’Italie est éliminée à cause de la supercherie contre le Chili et des énormes limites de son duo de sélectionneurs Ferrari-Mazza, dommage car beaucoup sont d’accord pour dire que cette Nazionale avait les cartes en main pour disputer le titre au Brésil lors de cette édition.

Les matches

- 1er Tour: 31.05.1962 (Santiago) Italie-RFA 0-0

- 1er Tour: 02.06.1962 (Santiago) Italie-Chili 0-2 (Ramirez, Toro)

- 1er Tour: 07.06.1962 (Santiago) Italie-Suisse 3-0 (Mora, Bulgarelli x2)

Classement Groupe B

L’effectif

Gardiens: 1 Buffon (Inter) · 12 Mattrel (Palermo) · 13 Albertosi (Fiorentina)

Défenseurs: 2 Losi (Roma) · 4 Salvadore (Milan) · 5 Maldini (Milan) · 16 Robotti (Fiorentina) · 18 David (Milan) · 19 Janich (Bologna)

Milieux: 3 Radice (Milan) · 6 Trapattoni (Milan) · 8 Maschio (Atalanta) · 20 Tumburus (Bologna) · 21 Ferrini (Torino) · 22 Bulgarelli (Bologna) · 14 Rivera (Milan)

Attaquants: 7 Mora (Juventus) · 9 Altafini (Milan) · 10 Sivori (Juventus) · 11 Menichelli (Roma) · 15 Sormani (Mantova) · 17 Pascutti (Bologna

Sélectionneurs: Mazza – Ferrari

On retrouve dans cette sélection quelques uns des plus grands joueurs qui ont marqué l’histoire du football italien avec pas moins de 7 joueurs du Milan AC qui forment l’épine dorsale. Seulement un seul joueur de l’Inter (Buffon, cousin du grand-père de Gigi) et deux de la Juventus (Sivori & Mora). L’équipe de Bologna est bien représentée avec 4 éléments, on compte d’ailleurs des joueurs de 10 clubs différents dont Sormani de Mantova, qui était un des 4 oriundi (avec Sivori, Maschio et Altafini champion du Monde avec le Brésil quatre ans plus tôt)

L’Équipe-type

La Nazionale s’articulait en 424 facilement modulable en 433, difficile donc de dégager une formation type puisque le duo Mazza-Ferrari a trop fait tourner l’effectif. Mais on retrouve surtout des grands noms, parmi les plus grands de l’histoire du football italien. Une défense à 4 guidée par Cesare Maldini, avec Giacomo Losi “Cor de Roma”, le milieu a dû se passer de Trapattoni blessé. Le potentiel offensif était incroyable avec deux ballons d’or (Sivori et Rivera) et un des plus grands goleadors José Altafini.

Et le vainqueur est…

Le Brésil fait coup double et rejoint du même coup l’Italie en tête des victoires en Coupe du Monde avec deux unités. Pas de Pelé en tête d’affiche mais plutôt Vava et Garrincha, en finale ils disposent de la surprenante Tchécoslovaquie qui perd là déjà sa deuxième finale de Coupe du Monde après celle de 1934. Parmi les champions du monde, Jair débarque dans la foulée en Italie et deviendra un pilier de la Grande Inter (il porte aussi le maillot de la Roma), tandis qu’Amarildo arrive un an plus tard au Milan et évoluera aussi avec la Roma et la Fiorentina.