Ce samedi, l’Inter Milan jouera la cinquième finale de son histoire dans la plus prestigieuse des compétitions européennes. Pour donner un ordre d’idée de la distance qui sépare l’Inter d’aujourd’hui des onze qui ont participé à ces finales, il suffit de dire que les Beatles étaient encore en activité à l’époque des trois premières finales. Et la Ligue des Champions s’appelait encore la Coupe des clubs champions. Au cours de ces rencontres, la Grande Inter a défié le Real Madrid de Di Stéfano, le Benfica Lisbonne d’Eusébio, le Celtic Glasgow de heu… passons, et l’Ajax Amsterdam de Johan Cruijff. Des constantes entre ces quatre finales et la cinquième : le star system était déjà en place et le jeu efficace de l’Inter est encore et toujours critiqué.

Le parcours

C’est la toute toute première participation de l’Inter Milan en Coupe des clubs champions et pour leur baptême du feu, les nerazzurri ont bien du mal à trouver leurs marques avec un seizième de finale sur la pelouse d’Everton qui se termine sur un score nul et vierge. Lors du match retour à Milan, le Brésilien de l’Inter Jair marque l’unique but de cette double confrontation. En revanche, l’équipe italienne passe tranquillement le cap des huitièmes puis des quarts de finale contre Monaco et le Partizan de Belgrade, respectivement. La demi-finale contre le Borussia Dortmund est une rencontre plus dure contre une équipe forte physiquement et dotée de bonnes individualités, mais l’Inter passe avec un match retour solide à Milan.

1er Tour:

Everton-Inter 0-0
Inter-Everton 1-0

8ème:

Inter-AS Monaco 1-0
AS Monaco-Inter 1-3

Quarts:

Partizan-Inter 2-0
Inter-Partizan 2-1

Demi:

Borussia Dortmund-Inter 2-2
Inter-Borussia Dortmund 2-0

1964 : Le Real, parce que vous aussi, vous le valez bien ! (Printemps).

L’Inter tombe en finale sur un très gros poisson puisque le Real Madrid a déjà remporté cinq fois l’épreuve reine. La finale se joue le 27 mai 1964 au Prater de Vienne. Les joueurs de l’Inter sont fascinés par leurs adversaires du Real, le capitaine Armando Picchi est fan de Ferenc Puskás, tandis que Sandro Mazzola n’a d’yeux que pour Di Stéfano. À la sortie des vestiaires, ils admirent presque tous la classe des joueurs du Real. L’Espagnol de l’Inter Luís Suárez avait déjà connu les coupes d’Europe avec le Barça. Il recadre ses coéquipiers avant le match et tape sur l’épaule du jeune Sandrino Mazzola : « Tu es en train de regarder Alfredo, là. Ce sont des joueurs comme nous, tu sais ? » Le gardien Giuliano Sarti a également beaucoup d’expérience puisqu’il a perdu la finale de la coupe 1957 alors qu’il jouait avec la Fiorentina contre… le Real Madrid. Aurelio Milani a également participé à des matchs de coupe d’Europe, avec la Fiorentina lui aussi.

Le Real Madrid a les stars et l’expérience. Mais certains de ces joueurs sont vieux, usés, fatigués. Di Stéfano et Puskás ont 37 ans, tandis que dans l’équipe d’en face, Mazzola et Facchetti n’en ont que 21. L’entraîneur franco-argentin Helenio Herrera choisit une formation qui lui permet d’emmener le catenaccio à un niveau de perfection jamais atteint. Il y a deux joueurs étrangers dans son équipe : l’Espagnol Luís Suárez qui a été Ballon d’Or 1960 avec le Barça du même Herrera et l’ailier brésilien Jair da Costa. Herrera est arrivé à l’Inter pour la saison 1960-1961. Il est à la pointe en matière de tactique, de préparation physique et de psychologie.

L’Inter d’Herrera, comment ça marche ? Le libero Picchi dirige une défense solide devant un gardien expérimenté. Le latéral gauche Facchetti monte très haut. Luís Suárez organise les jeu en deux temps trois mouvements et peut lancer des passes en profondeur millimétrées à destination des rapides Mazzola et Jair.À Vienne, Mazzola marque le premier but de la rencontre juste avant la mi-temps, ce qui permet à l’Inter de s’appuyer sur sa défense en béton armée et d’attendre une contre-attaque qui lui permettra d’enfoncer le clou avec un but de Milani. Le Real revient à 2-1 sur un ciseau de Felo, mais les joueurs madrilènes n’inquièterons jamais vraiment leurs homologues milanais et Mazzola inscrit le dernier but du match quelques minutes plus tard.

L’Inter remporte donc la coupe la saison de sa première participation à l’épreuve. Elle devient aussi la première équipe à remporter la Coupe des clubs champions sans perdre le moindre match ! De plus, la victoire de l’Inter ancre la place de la ville de Milan comme capitale du football européen puisqu’en 1963, c’est le Milan AC qui a remporté la Coupe des clubs champions. C’est la seule et unique fois que le trophée à été remporté successivement par deux clubs différents de la même ville.

Le président de l’Inter Milan est alors Angelo Moratti. C’est le père du président actuel de l’Inter. Les deux hommes ont beaucoup investi pour voir leur équipe gagner. Angelo Moratti a su s’entourer des meilleurs en comptant dans l’organigramme du club l’entraîneur Helenio Herrera, le directeur sportif Italo Allodi, et le vice-président Peppino Prisco. Luís Suárez raconte la joie du propriétaire du club après la victoire finale : « Nous avons porté en triomphe notre président et j’ai vu dans ses yeux un bonheur que je n’ai plus jamais revu chez aucune autre personne. »

À l’époque déjà, l’efficacité défensive agaçait certaines personnes qui y voyaient une forme d’anti-jeu. L’Inter est ainsi sifflée à Vienne. L’équipe est victorieuse, mais elle est néanmoins critiquée par les journalistes et les entraîneurs. Ces derniers vont néanmoins s’inspirer en douce des méthodes d’Helenio Herrera. Facchetti et Mazzola ont par la suite tenu à préciser que la Grande Inter qui gagnait tout ne se focalisait sur la défense que dans quelques matchs par saison, surtout en Europe.

La feuille de match d’Inter-Real

INTER-REAL 3-1 (1-0)

BUTEURS : Mazzola (43′), Milani (61′), Felo (70′) et Mazzola (76′).

INTER : Sarti ; Burgnich, Guarneri, Picchi, Facchetti ; Tagnin, Suárez, Corso ; Jair, Milani, Mazzola. Entr: Herrera.

REAL : Vicente ; Sanchez, Santamaría, Zoco, Pachín ; Muller, Felo, Di Stéfano ; Amaro, Puskás, Gento. Entr: Muñoz.

ARBITRE: Stoll (Autriche).