DOSSIER : La diaspora italienne, Bernard Zenier

Par Christophe Mazzier publié le 16 Avr 2021
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Nous parcourons de nouveau ces sillons creusés par la diaspora italienne. Ces séjours qui devaient, souvent, n’être que temporaires, ont vu des familles s’installer dans leur nouveau milieu de manière indéterminée. Ces visages tirés par le dur labeur et endurcis par une jeunesse démunie font désormais partie du paysage. Ces noms à connotation italienne, cette culture, ces histoires, ces endroits, ces sonorités lexicales dantesques, se sont fondus au sien du pays hôte laissant à leur descendant des souvenirs impérissables, une attache immuable au Bel Paese. Aujourd’hui, nous allons nous attarder sur Bernard Zenier, un pur produit Lorrain et l’un des meilleurs buteurs, historique, du championnat de France.

Une Minette qui appâte

« Dans la pleine rase, sous la nuit sans étoile, d’une obscurité et d’une épaisseur d’encre, un homme suivait seul la grande route… » menant sur les grands axes de Metz-Nancy. Cet incipit de Germinal aurait pu s’écrire à travers les couches calcaires et siliceuses constituant la croûte de ce bassin minier, sur laquelle est disséminée mines de fer à ciel ouvert et souterraines. Nous sommes au début du 20ème siècle.

L’exploitation du fer en Lorraine va durer des années 1830 jusqu’en 1997. Mais c’est au début du siècle dernier que le « Texas Lorrain » va attirer une main d’œuvre étrangère de plus en plus importante. Au côté des Français, nombreux sont Espagnols, Polonais, Belges, Italiens. La migration italienne est massive, un pic, dû à des arrivées sans véritable structuration par l’Etat français, est atteint en 1930. A cette époque, le territoire est un véritable Far West, les mines se multiplient ainsi que les usines sidérurgiques, la production se situe au premier rang mondial pour le fer. Les Italiens composent 37% de la population étrangère de la Région soit 100 000 individus rien que sur ce territoire.

La migration est telle que des quartiers prennent littéralement les couleurs transalpines. De manière analogue au bassin de Briey, certaines villes sont surnommées « Little Italy » (Jœuf, Homécourt, Auboué, Longwy…) La « diaspora engendre la ville autant que la ville engendre la diaspora » est une phrase reprise d’un journal de l’époque. La métamorphose d’espaces urbains prend forme à l’orée des complexe industrielles, et va engendrer une concentration des colonies italiennes. Cette sédentarisation permettra l’enracinement, le regroupement familial, la fin de la mobilité, l’appartenance à un territoire. Les enseignes sont en italien, la diaspora détient 1/3 des commerces de boisson. Il n’arrivera plus le moment de revoir le clos de sa pauvre maison. Les retours, même s’ils sont encore conséquents (au moins jusqu’à la 2ème guerre mondiale), se feront de plus en plus rarement.

L’enfant chéri de Lorraine

Bernard Zenier n’aura pas connu cette époque, mais sa trajectoire transpire la « gueule jaune » du nom des mineurs de fer. Ce sont ses grands-parents italiens qui sont venus travailler dans les mines de Lorraine, appâtés par les rêves d’une vie meilleure. Et comme toute famille italienne, le ballon est religion. Il signera sa première licence à Florange, l’un des derniers lieux de luttes ouvrières. Son père Serge était un ancien joueur de foot passé par le FC Metz. Trois autres oncles ont également été professionnels, dont Bruno Rodzik qui a joué pour le « grand » Stade de Reims.

Autant dire que dans une famille italienne, et dans ce cocon footballistique, le football était sacré et les discussions le dimanche tournaient autour du ballon rond. A 17 ans, « l’enfant chéri de la Lorraine » choisit le FC Metz en 1974, où il rejoint son beau-père Carlo Molinari, et la Moselle, en même temps qu’un petit enfant rital lorrain comme lui, Patrick Battiston. Il réalise, ainsi, un pied de nez au club phare de son territoire, la Meurthe-et-Moselle, et rallie l’ennemi juré des Grenats, l’AS Nancy Lorraine.

Un Meurthois chez les Mosellans

Ensuite après avoir explosé avec le FC Metz, il rejoint le rival Nancy et Michel Platini en 1978. Puis Bordeaux, avec lequel il sera champion de France, et Marseille. A l’arrivée de Tapie, il est sorti de l’équipe, et retourne au FC Metz, où il vivra ses meilleures années. Il finira meilleur buteur du champion en 1987, ce qui lui vaudra sa dernière sélection avec l’équipe de France. Il accumulera quatre présences, dont la première était face à l’Allemagne de Beckenbauer en 1977. En 1988, il gagnera la 2ème et dernière Coupe de France de l’histoire des Grenats, avec comme partenaire un certain Carmelo Micciche (résumé vidéo ci-dessous avec, au commentaire, le légendaire duo Rolland-Larqué).

En 1991, Bernard Zenier, l’homme au crâne dégarni, si remarquable, met un terme à sa carrière. Il aura participé à 466 matchs de Ligue 1, marqué 130 buts, faisant de lui l’un des tous meilleurs buteurs du championnat de France. Les puristes se rappelleront de cet attaquant talentueux, au pied gauche soyeux, qui aura marqué le FC Metz et la D1, de son empreinte indélébile.

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1.Enzo Scifo, le « petit pelé du Tivoli »
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14. Maurizio Gaudino, l’italien de la Mannschaft
15. Carlo Molinari, et la colonie italienne du FC Metz
16. Mario Zatelli, un pied-noir à Marseille
17. Sforza, un italo-suisse
18. Les Frères Revelli, une historie stéphanoise
18. Bernard Zenier, l’enfant chérie de Lorraine




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