Quelle horrible sensation ce doit être. Celle de savoir pertinemment, que l’on est né à la mauvaise époque ou bien que l’on a bu du vin de la mauvaise bouteille et ne rien pouvoir faire pour changer cela. Ne pas pouvoir retourner en arrière et modifier une trajectoire qui se dessine sans vous laisser le moindre pouvoir sur son orientation. C’est un peu ce qui arrive à Ricky Alvarez, le joueur argentin de 25 ans de l’Inter depuis quelques saisons. Arrivé en 2011 pour 12 millions d’euros dans un club qui a tout gagné mais qui ne gagne plus, par la volonté d’un entraineur et d’un président qui ne sont plus en place, il joue a un poste qui n’existe plus à l’Inter, et de moins en moins dans le football italien : celui de trequartista. Pas assez talentueux et décisif pour que l’on s’adapte à lui, Ricardo Gabriel Alvarez doit désormais trainer ses démons derrière lui et tenter de se plier aux schémas tactiques d’un Walter Mazzarri inflexible. Et pourtant tout avait bien commencé cette saison.

Dans un “lointain passé récent”, Alvarez figurait parmi les titulaires indiscutables du natif de San Vincenzo. L’oxymore précédente se justifie d’elle même, car cette époque pas si vieille (6 mois), semble dater de plusieurs années tellement le joueur n’est plus que le fantôme de celui qu’il était. Le 3-5-1-1 du début de la première moitié de saison prôné par Mazzarri, plus par défaut que par choix (Icardi et Milito étant blessés, seul Palacio pouvait jouer en pointe) lui allait comme un gant. Ce poste de trequartista, sorte de 9 et demi, où l’artiste et adepte de la belle passe décisive, du dernier dribble fatal et du beau football peut se faire plaisir, lui allait à merveille. Arrivé pour suppléer le génial Wesley Sneijder qui désormais s’éclate en Turquie, Ricky Alvarez se retrouve dans un pays où le trequartista n’existe quasiment plus. De plus en plus d’équipe évoluent en 3-5-2 à plat au milieu (il reste quelques exceptions : le Milan AC par exemple). Ainsi, quand Mazzarri décide de passer au 3-5-2 et d’oublier le 3-5-1-1, Alvarez a du reculer d’un cran. Positionné en électron libre dans l’axe du milieu de terrain ou sur les côtés, l’Argentin n’est plus si à l’aise. Lui qui tournait autour de la surface de réparation et de son attaquant doit maintenant partir de plus loin. Lui qui donnait la dernière passe, doit désormais s’atteler à construire le jeu de son équipe. Lui qui sait donner le dernier coup de rein nécessaire à l’aboutissement d’une action ne peut plus partir en dribble d’aussi loin dans un championnat aussi physique que la Serie A. Ce positionnement ne lui va donc pas, ce qui explique pourquoi il s’exile sur les côtés, rare endroit où il se sent encore un peu vivant, capable de déclencher un débordement sur l’aile. Ricky Alvarez, c’est donc le prototype du joueur se trouvant au mauvais endroit, au mauvais moment, et qui est peut être passé à côté d’une superbe carrière en choisissant l’Inter, plutôt qu’une autre équipe dans laquelle il se serait plus épanoui. Ça on ne le saura jamais, mais une chose est sure : quel gâchis depuis trois ans !